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patrice follenfant - Page 19

  • la force

              Le monde est de plus en plus dur, sans leurs murs

                 les voisins dressent des chiens

                 dure au fond la Terre se fond sur un glacis d'armes mûres.

                 Se partagent les bombes et montent les couleurs,

                 croissants, lunes opaques, yeux violets

                 croix qui gesticulent, corps au piquet

                 Nations

                 J’entends vos murmures,

                 l'horizon n'est plus sûr.

                Se brouillent les cartes

                où les cartes sont mortes.

                Et pourtant dehors tout est calme,

                 comme si l'on avait poussé la porte

                 ou baissé le volume

                 du poste, où est la force ?





    © Lacalavera

     

     

  • les barbares

    étron fumant la horde

    ils ont marché dedans

    je rêve

    avec leurs crêtes et le vin blanc

    qu’ils boivent

    courbés, vacillants

    vers le sol, la terre

    et les chiens devant

    les tirent




    © lacalavera

  • rondes de chiens la nuit

    L’opacité de la devanture ne présageait rien de bon, quant à l’intérieur, c’était ambiance salle de classe avant l’arrivée du professeur. J’ai serré quelques mains.

    Il fut question des fafs. Les élections approchaient, les nazillons s’agitaient poussés par un vent mauvais. Suivirent divers témoignages, des informations d’autres groupes. Les fafs, ils avaient dû atteindre des abîmes, des zones extrêmes où plus rien ne pousse. C’est ça qui les faisait avancer. Ils se prenaient pour des aventuriers dans le désert hostile de leurs pensées. Des guerriers agités par la haine de tout ce qui bouge en dehors du cadre. Ils avaient comme représentation du monde un schéma quasi religieux, des fondations coulées dans la préhistoire de l’humanité. Et puis, il y avait tous les autres, qui avançaient masqués, un peu par procuration, la foule encore silencieuse qui diffusait dans l’air son aigreur et bientôt par contagion sa haine de l’autre et de soi, de l’autre surtout, c’était plus facile.

    Mes frères, il fallait les démolir, les fracasser, les déchouquer, les renvoyer dans cette boue originelle d’où ils n’auraient jamais dû sortir. Ce bouillon, cette purée avec des bulles. On imaginait là-dedans toutes sortes de créatures, les unes à peines ébauchées, des avortons, des têtards, des chimères et les autres quasiment terminées qui attendaient le ticket d’entrée pour débouler.

    Elles avaient des dents longues ces créatures. Il n’y avait pas trente-six façons d’en venir à bout. Il fallait leur rentrer dedans, leur rentrer dedans. Ainsi parlait le professeur.

    On commençait à être un peu réchauffés. On bougeait les pieds, on aurait peut-être pu danser, un truc un peu chaloupé à la manière des gospels mais je pense que ma motion n’aurait pas été majoritaire.

    Le faf, c’était quand même la culture réduite à la collection des ronds de bière. Tiens, j’aurais bien voulu quand même en tenir un entre quatre yeux, un qui serait bien sec, peut-être même un peu vieux et lui parler. Mon faf, comme d’autres avaient un dalmatien, une sorte de parrainage en somme. Voir s’il y avait quelque chose dedans et puis lui apprendre des mots nouveaux chaque jour, lui montrer des toiles de maîtres. Peut-être qu’il pourrait évoluer comme ça, par capillarité. On ne leur parlait jamais. J’étais bon pour la rééducation.



    extrait de "Rondes de chiens la nuit"


    © lacalavera